Nous ne sauverons l’existant qu’à le réinventer
Vous êtes nombreux.ses à être venu.e.s à la Parole Errante pour répéter ou assister à une pièce de théâtre, organiser ou écouter un concert, présenter ou voir un film, convoquer une assemblée ou simplement y prendre la parole.
Il y a une vingtaine d’années, Armand Gatti, poète et dramaturge anarchiste, fondait à Montreuil ce lieu. Depuis lors, on ne compte plus les initiatives culturelles, sociales et politiques qui ont bénéficié de cet espace. Rares sont les lieux en région parisienne qui pratiquent une telle ouverture où ni l’argent, ni la reconnaissance préalable ne constitue une barrière. Ici se côtoient des créateur.ice.s confirmé.e.s, la première d’une compagnie naissante, un festival international, un festival de quartier, une fête communautaire et une assemblée.
Du fait de son indépendence, la Parole Errante a aussi accueilli de nombreuses luttes. On peut citer à titre d’exemples, le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, les assemblées populaires faisant suite à l’assassinat de Rémi Fraisse, l’équipe du cinéma Le Méliès en lutte, de nombreux concerts de soutien à la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, aux prisonniers de Villiers-le-Bel, etc.
En décembre 2016, une partie de l’histoire de la Parole Errante se termine. Un collectif d’usager.ère.s, metteur.euse.s en scène, commédien.ne.s, libraires, écrivain.e.s, réalisateur.ice.s, musicien.ne.s, enseignant.e.s, éducateur.ice.s, militant.e.s, a pris l’initiative d’imaginer un devenir pour ce lieu et d’écrire un projet nommé La Parole Errante Demain. Un projet qui part de l’histoire réelle du lieu et de la diversité des besoins matériels et existentiels auxquels il a répondu. Un projet fondé sur l’accueil et la solidarité, où les dimensions sociales, politiques et culturelles continueraient de se croiser. Un projet de recherche, d’expérimentation et de fabrication du commun.
Après une quasi-année de silence et d’atermoiement, sans qu’aucune réponse n’ait été donnée, sans qu’aucun projet clair n’ait été formulé publiquement, le Conseil Départemental a finalement lancé un appel à projet à l’été 2016, projet qui serait séléctionné et mis en place après la fermeture de la Parole Errante en décembre. Au processus transparent et démocratique engagé par le collectif La Parole Errante Demain, le Conseil Départemental a opposé un appel à projet concurrentiel, dont l’issue reste à sa discrétion.
Sans aucun égard pour toutes les réalités qui bénéficient de ce lieu jour après jour, mois après mois, années après années. Sans aucun égard pour tou.te.s celles et ceux qui en auront besoin à l’avenir en dehors de toute logique de rentabilité ou de reconnaissance, mais simplement parce qu’ils et elles en ont besoin et que partout les lieux manquent. Il est très probable qu’en 2017 il ne soit plus question d’entrée libre, d’expériences musicales, théâtrales, cinématographiques hors-normes, de concerts de solidarité, de fêtes de quartier, de fêtes syndicales, d’assemblées en lutte contre la réforme de la psychiatrie, contre les violences policières, contre la réforme du code du travail, etc.
Ce mépris des politiques à l’égard de nos besoins, de nos aspirations, de nos lieux, de nos vies, de nos luttes, nous le connaissons tou.te.s. Et nous sommes de plus en plus nombreux.ses à le dire dans la rue, sur les lieux de travail, dans et hors des institutions : cela suffit !
Les enjeux de défense de la Parole Errante concernent le mouvement contre la loi travail et tout ce qui va suivre, en tant qu’elle a été l’alliée et un support de nombreuses luttes des dernières années.
Les enjeux de défense de ce lieu concernent la ville où nous vivons. La culture est un outil de transformation de la ville et de sa population. Si la Parole Errante ferme, le lieu se transformera en un lieu culturel normalisé et inféodé, et c’est la ville qui continuera de se transformer dans le sens d’une dépossession…
Lutter pour la Parole Errante, c’est lutter pour le territoire où nous vivons, pour ne pas perdre pied ou reprendre pied, sentir un sol commun, une possibilité de se retrouver, de résister, de lutter, d’exister. Nous avons besoin de lieux pour habiter le monde.
Pour discuter, nous rejoindre, connaître le programme des mois à venir, proposer un évènement, une discussion, vous pouvez passer au Café-Librairie Michèle Firk du mercredi au samedi de 15h à 20h, venir à un événement, nous écrire, signer la pétition (qui fait aussi office de mailing list). Un site, un projet, une pétition pour la Parole Errante Demain : laparoledemain.jimdo.com.
